Lac Bleu ou Lac Lhéou

Lac Bleu*

Paisible lac, dont les ondes captives
Si mollement réfléchissent tes rives,
Qui t'éveillant,
Quand des longs pics le sommet se colore,
Si doux reçois le baiser de l'aurore
Et si brillant !

Onde où le vent vient rafraîchir ses ailes,
Plaine d'azur qu’émaillent d'étincelles
Les feux du soir,
Calme surface où le ciel bleu se mire,
Qu'aime la lune, où l'étoile s'admire,
Vaste miroir !

Bassin dormant où le chamois vient boire,
L'aigle tremper sa plume fauve et noire,
L'aigle en lambeaux,
Où les vallons et les cimes hautaines
Versent sans fin de leurs claires fontaines
Les fraîches eaux ;

Beau lac, dont nul n'a sondé les abîmes,
Soit que des monts tu répètes les cimes,
Calme et dormant,
Soit que tes flots, dont la crête s'allume,
Semblent rouler dans leur brillante écume
Un firmament ;

Soir ou matin, lac tranquille, à toute heure,
Au cœur léger, comme à l'âme qui pleure,
Ton charme est doux ;
Et dans la joie ou la mélancolie,
Sur le gazon de tes bords on oublie
Le temps jaloux !

L'adolescent, dont l’œil noyé de flamme
Cherche ou poursuit une image de femme,
Un front charmant,
En regardant tes ondes aplanies,
Aime y rêver des amours infinies
L'enchantement,

Des tièdes nuits les extases, les fièvres,
Les longs baisers essuyés sur les lèvres
Par le zéphyr,
Et ces adieux, au chant de l'alouette,
Que Roméo murmure à Juliette
Dans un soupir !

Mais nous si loin de notre fraîche aurore.
Et dont le front penche ou se décolore,
Nous presque vieux,
De ces vains noms, amour, fortune, gloire,
Nous qui savons hélas ! ce qu'il faut croire,
Ce qui vaut mieux,

Assis au bord de cette onde épurée
Qui luit au loin, dont la nappe azurée
N'a pas un pli,
Nous la prions, charmés de son silence,
De nous bercer dans la molle indolence
Ou dans l'oubli !

Jeune homme, vas, suis ta belle chimère,
Dis à ces flots rayonnants de lumière,
De t'éblouir,
De ranimer les fleurs de ta guirlande...,
Moi, voyageur lassé, je leur demande
De m'endormir !

Septembre 1853

* Magnifique nappe d’eau, à quatre ou cinq heures de Bagnères. Ce beau lac, suspendu à deux mille mètres au dessus de la mer, était connu sous le nom du lac de Lheou, avant d'avoir reçu le nouveau nom qu'il mérite si bien.

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Soutras, Frédéric. - Les Pyrénéennes, rêves pensées et paysages / Frédéric Soutras. - Paris : Didier, 1856. -  Médiathèque André Labarrère – fonds anciens – Usine des Tramways - cote D 1366
En ligne sur Gallica  (
version de l'imprimeur J.-M. Dossun, Bagnères-de-Bigorre)

 

 

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